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23
juillet
2019

Les soins palliatifs, un service basé sur l'humain

Le 23 juillet 2019 dans la catégorie Traitements
Les soins palliatifs, un service basé sur l'humain

Bien sûr, on espère vivre, mais évoquer la mort n'est pas un aveu de faiblesse. Elle nous attend tous finalement. Il s'agit plutôt d'apprivoiser la peur de la mort en permettant de vivre ce passage avec le moins de douleurs possible, dans le respect des croyances de chacun. «Cet endroit m’a fait sortir de mes jugements, et bouger mes frontières entre palliatifs et curatifs.», explique cette jeune médecin. Il y a ceux qui préfèrent continuer à voir cela comme des soins, et ceux qui la regarde en face en essayant d'améliorer leur qualité de vie. Et pour couper court aux préjugés, une brochure vient d'être éditée par le Centre national de soins palliatifs et de la fin de vie. Elle rappelle qu'"il s’agit de passer d’une phase de médicalisation extrêmement agressive et intense à une phase d’accompagnement de fin de vie."

Réflexion avec une médecin de Basse-Terre, à partir d'une brochure qui vient d'être éditée par le Centre national de soins palliatifs et de la fin de vie.


  Les soins palliatifs, c'est quoi au fait ?


Avec la longue tragédie de Vincent Lambert, les soins palliatifs ont été évoqués à tout vent. Mais qu’est-ce exactement ? Une pratique médicale réservée à la fin de vie ? Une façon de gérer, sans souffrance, l’agonie ? Ou bien cela peut-il renvoyer à un exercice médical au long cours ? Pourrait-on même parler, alors, de médecine palliative, voire d’une médecine d’accompagnement ? A l’heure des maladies chroniques, où mettre le curseur ? Cela renvoie-t-il, par exemple, à une certaine forme de démédicalisation ?

 
L’interrogation peut paraître formelle, d’autant qu’aujourd’hui un constat s’impose : quelle que soit la définition que l’on retient, le manque de moyens est criant. «Nous avons beaucoup moins de lits de soins palliatifs par rapport aux autres pays européens», argumente Véronique Fournier, qui préside le Centre national de soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV) en présentant les résultats d’un groupe de travail sur le thème «Des soins palliatifs à la médecine palliative» (1), ajoutant même : «On utilise un certain nombre de ces lits à d’autres fins. L’urgence reste à créer des lits de soins palliatifs.»
 

Il n’empêche, que cache ce qualificatif de soins «palliatifs» ? «Les concepts sont aujourd’hui confus», note la sociologue Sandrine Bretonnière, qui a coordonné le groupe de travail. Certes, mais dans les faits et dans l’opinion, les soins palliatifs renvoient exclusivement à la fin de vie. «On évoque souvent la démédicalisation comme une approche palliative, mais cela n’est pas toujours la solution. En fin de vie, un cancer cela fait mal», poursuit Sandrine Bretonnière.

 
Les frontières sont ainsi, relativement floues. La Dr Faustine Colin parle très bien de ces zones grises. Médecin en soins palliatifs, formée très classiquement, elle exerce depuis deux ans en Guadeloupe, à Basse-Terre. Et sa pratique est passionnante, loin des clichés qui figent les situations. Elle est dans une clinique, plutôt spécialisée en gériatrie, mais avec un étage pour les soins palliatifs et un autre pour la cancérologie. «On pourrait croire que ce sont deux étages que tout oppose, raconte-t-elle. Eh bien là, non. La présence de l’un influence l’autre.» Elle explique : «Au début, j’avais des repères stricts. Mais peu à peu… On retrouve des patients à qui on fait une chimio palliative. Est-ce bien utile ? On essaye de prolonger le plus longtemps possible, mais pourquoi ? Or, quand on suit une patiente qui, depuis quinze ans, est sous chimio, et dit se porter bien, pourquoi l’arrêter, si cela la maintient dans une bonne qualité de vie ?»
 

 
Cette jeune médecin ajoute : «Je fais des choix, mais ils sont vraiment à la carte. Il y a des patients qui veulent savoir, d’autres pas. Pour certains, le mot palliatif ne veut rien dire, ils sont à la clinique et on les soigne.» Et elle l’avoue : «Cet endroit m’a fait sortir de mes jugements, et bouger mes frontières entre palliatifs et curatifs.» Elle développe : «Quand je suis arrivée, j’étais mal, je me disais : devant tel patient on ne va pas lui faire un bilan sanguin, cela servirait à quoi ? N’est-il pas en soins palliatifs ? Et pourquoi pas ? De même pour les transfusions : si de le transfuser permet à ce vieux patient de lui faire passer correctement la fête des pères, pourquoi ne pas le faire ? On se retrouve toujours en remise en question. Et on ne sait jamais si on en a trop fait, ou pas assez. C’est un peu inconfortable. Certaines familles disent que leur proche n’est pas en soins palliatifs, mais en cancérologie.  Pourquoi pas ? C’est cela mon travail : m’adapter.» Et si c’était cela, la médecine palliative ?


 
(1) «Des soins palliatifs à la médecine palliative, quels enjeux pour l’avenir», édité par le CNSPFV.
 
Source : article d'Eric Favereau pour Libération